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Journée d'étude « Nature et pouvoir. Relire Singulière ethnie de Fernand Deligny »

Publié le 9 juillet 2025 Mis à jour le 9 juillet 2025
Date(s)

le 14 novembre 2025

Lieu(x)
à confirmer
Journée d'étude « Nature et pouvoir. Relire Singulière ethnie de Fernand Deligny »

Coorganisée avec l'unité de recherche Institut de recherches philosophiques (IRePh)


Dans son ouvrage Singulière ethnie, sous-titré Nature et pouvoir et nature du pouvoir et paru en 1980, Fernand Deligny, qui s’est établi depuis 1967 à Monoblet dans les Cévennes avec des autistes mutiques, compare le fonctionnement des sociétés archaïques décrites par Clastres et son propre mode de vie avec les enfants autistes.
À partir de l’observation de ces deux types de société étrangement parentes, il essaie de saisir ce qu’il peut en être du pouvoir. On observe à Monoblet comme chez les Guayaki par exemple une même manière d’évacuer le pouvoir qui passe par l’existence d’un unique détenteur de la parole qui ne dit rien qui soit suivi d’effet et que personne n’écoute vraiment. Non seulement les abris qui ont poussé sur les aires de séjour des enfants autistes dans les Cévennes évoquent ceux des sociétés amérindiennes, mais Deligny se sent très proche des chefs indiens impuissants dont la parole vide permet de conjurer la résurgence malencontreuse du pouvoir : « le rôle qui m’incombe est de lancer des mots durs dans le cours coutumier d’une ethnie singulière, un peu comme on jette des cailloux dans l’eau » (Singulière ethnie, p. 31).
Deligny critique pourtant ce qu’il comprend chez Clastres comme une appréhension quasi instinctive du Pouvoir analysée comme pressentiment de ce que peut la nature humaine ou de ce que la nature a de menaçant, bref comme une résurgence de la nature. Chez Deligny, pour résister au pouvoir, il faut d’abord appréhender la
puissance d’arraisonnement du langage : les effets du langage solidaires de ce qu’il nomme la « conscience d’être » ou le fait d’« être conscience d’être ». Il distingue cette modalité langagière de la conscience d’un autre mode d’être, tacite, celui simplement d’« être humain ». La question de Deligny est celle de savoir ce qu’il en est
d’être humain hors des effets de la loi du langage ou de la conscience d’être. Pour se prémunir du pouvoir, à la différence de Clastres, il y a moins à développer une allergie à l’exercice d’une volonté politique, qu’une étrangeté à la signification qui n’appartient qu’à la conscience d’être : ce que Deligny nomme un processus de
« désignification ».
Il s’agira donc, avec des spécialistes à la fois de F. Deligny et de P. Clastres, mais aussi plus généralement de philosophie de l’anthropologie, de prolonger le dialogue critique entre les deux penseurs.

Mis à jour le 09 juillet 2025