Version française / La recherche
Miriam Bankovski, "La justice sociale après Kant: entre constructivisme et déconstruction", thèse soutenue le 22 novembre 2008
(Rawls, Habermas, Lévinas, Derrida)
Jury
Ch. Lazzeri (Président), professeur de philosophie à l'Université Université Paris Nanterre
Paul Patton, Professeur de philosophie à la School of History and Philosophy at the University of New South Wales, Sydney, Australie
C. Malabou, Maître de conférence en philosophie à l'Université Université Paris Nanterre La Défense
Lars Thomassen , Queen Mary University Of London - Prérapporteur
Résumé
Le but de cette thèse est d'examiner le rapport entre deux approches de la justice : d'une part, le projet constructiviste et reconstructiviste de Rawls et Habermas et d'autre part, le projet déconstructionniste de Lévinas et Derrida. Nous cherchons d'abord à identifier la différence centrale entre les approches, reconstruisant chaque théorie de la justice telle qu'elle se construit en rapport avec la philosophie pratique de Kant. Nous montrons ensuite que ces deux projets sont complémentaires.
Rawls et Habermas défendent la possibilité de déterminer le contenu de l'impartialité kantienne au moyen de « la position originelle » ou du « principe de discussion ». Au contraire, Lévinas et Derrida soutiennent l'impossibilité de cerner le contenu de la justice. A partir d'une lecture non-kantienne du principe moral, Lévinas défend un concept non-formel de responsabilité pour autrui. Certes, Derrida affirme la possibilité de la justice, mais il soutient aussi que sa forme déterminée ne saurait réconcilier la responsabilité devant autrui avec l'idée d'impartialité.
Nous défendons ensuite la complémentarité de ces deux projets. « La foi
raisonnable » dans la possibilité de la justice doit être complétée par l'affirmation de son impossibilité. En revanche, la défense de l'impossibilité est insatisfaisante sans affirmer la possibilité de construire une société équitable. En nous éloignant de la critique libérale selon laquelle la déconstruction se retire de la politique (Fraser, McCarthy, Benhabib), nous apportons notre appui à des voix dissidentes (Cornell, Mouffe, Honig, Young, Honneth, Patton, Thomassen) qui font valoir que la déconstruction est utile à la tradition constructiviste.
Mots-Clés
Rawls ; Habermas ; Lévinas ; Derrida ; Kant ; justice ; libéralisme ; démocratie ; morale ; éthique ; constructivisme ; déconstruction.
English title
Social Justice after Kant: Between Constructivism and Deconstruction (Rawls, Habermas, Levinas, Derrida)
Abstract
This thesis examines the relation between two contrasting approaches to justice: the constructive and reconstructive projects of Rawls and Habermas on the one hand, and the deconstructive projects of Levinas and Derrida, on the other. First, I identify the central difference between the two projects, reconstructing each account of justice as it develops in relation to Kant's practical philosophy. I then argue that the two projects are complementary.
Whilst Rawls and Habermas defend the possibility of objectively realising Kant's impartial standpoint by means of the original position or the procedures of discourse ethics, Levinas and Derrida affirm the impossibility of determining the content of justice. In Kant's moral law, Levinas discovers a non-Kantian principle of responsibility for the particular other which conflicts with impartiality. Distinguishing himself still further, Derrida defends the undecidability of justice's function. Justice must be pursued but no local determination can reconcile responsibility for the other with impartiality among all.
I then defend the complementarity of the two projects. Reasonable faith in the possibility of justice must be supplemented by the acknowledgment of its impossibility. Conversely, attesting to justice's failure is unsatisfactory without commitment to the possibility of constructing just social forms. Distancing myself from the liberal critique whereby deconstruction withdraws from the political (Fraser, McCarthy, Benhabib), I instead add my voice to a dissenting group (Young, Cornell, Mouffe, Honig, Honneth, Patton, Thomassen) which affirms that deconstruction can productively engage with the constructive tradition.
Key words
Rawls ; Habermas ; Levinas ; Derrida ; Kant ; justice ; liberalism ; democracy ; morality ; ethics, constructivism ; deconstruction.
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Mis à jour le 22 janvier 2019